La route touche à sa fin, Hautjardin se dessine finalement devant nous. Toute ma famille est présente. Il faut dire que ce n'est pas un événement anodin auquel nous sommes invités, mais bien le mariage de l'héritier Tyrell, Maegor. Je ne sais ce que j'éprouve réellement à cette pensée. Je sais parfaitement que ce que nous avons pu vivre par le passé est fortement prohibé. Alors que dire ? Rien à voix haute en tout cas. Qui plus est, mon épouse fait partie du voyage, bien qu'elle ait laissé notre fils à Accalmie avec quelques autres personnes de la famille trop faible ou simplement trop occupées pour se déplacer. Je sais bien que je suis un homme marié moi aussi, mais je dois bien admettre que j'aurais grandement préféré que ma douce épouse ne soit pas à mes côtés. Bien que je ne sois pas réellement inquiet quant à ce séjour dans les terres Tyrell, auprès de Maegor, je sais que je vais devoir être plus prudent quant à mes possibles excursions nocturnes en direction de mon amant occasionnel. Je ne compte pas déroger à la règle qui veut que lorsque nous soyons au même endroit, nos nuits soient passionnées et torrides. Cette seule pensée ravive en moi une flamme qui était éteinte depuis quelque temps maintenant. Bien que j'aie conservé un certain nombre distractions pendant mon temps loin de l'héritier Tyrell. Conscient que je dois être le plus discret possible quant à cette liaison, j'ai préféré éviter de lui écrire et il en a fait de même. Je ne sais comment l'expliquer, mais malgré tout, j'ai la sensation que quelle que soit la distance qui nous sépare, nous restons liés.

Les minutes défilent tandis que mon regard brun se perd sur le paysage environnant, mais surtout sur ce somptueux château sans nulle comparaison. Bien que j'apprécie beaucoup le château d'Accalmie où je réside, Hautjardin est une merveille d'architecture aussi bien en bâtiment qu'en jardin. C'est un réel plaisir de remonter l'allée qui mène à la cour du château, et qui est agrémenté de toutes sortes de végétations, répandant dans l'air des effluves fleuries. Une fois dans la cour du château, nous sommes rapidement accueillis par toute une suite de serviteurs, mais également par le seigneur du château et chef de famille Tyrell, Lyam. Les échanges sont courtois et je laisse mon frère converser avec Sir Tyrell, pendant que du regard, je cherche Maegor qui ne devrait pas tarder. Mon épouse fait bonne figure à côté de moi, bien que je me demande si elle n'a pas quelques soupçons à mon égard. Cependant, elle est rapidement détournée de mon attention par d'autres membres Tyrell que je ne prends pas la peine d'identifier. La seule chose qui occupe mon esprit, c'est de le voir lui. Je retire mes gants et les donne à un serviteur qui se charge de mes affaires, tandis que je commence à me frotter les mains, afin de chasser la sensation du cuir chaud sur ma peau. La route a été longue et bien que j'aie l'habitude des longs voyages, la perspective de pouvoir prendre un peu de repos et surtout de festoyer autour d'un large banquet, m'attire particulièrement, mais pas autant que celle de passer du temps en sa compagnie. Tandis que je balaye du regard toute la cour et son agitation, le voilà qui arrive. Droit, avec sa chevelure brune aussi indisciplinée que la mienne, sa longue cape aux couleurs Tyrell et sa fameuse broche dorée. Je ne peux m'empêcher d'esquisser un sourire comme un idiot. La sensation que le temps s'arrête alors que tout le monde continu de s'agiter autour de moi. Il commence par se diriger vers mon frère, que je rejoins assez rapidement, afin de la saluer. Je reste droit, silencieux et attends patiemment en assistant à un nouvel échange de courtoisie et de taquineries auxquelles j'esquisse un sourire amusée. Puis, tandis que Lyam s'adresse à Benjen et que les deux hommes prennent la direction de l'intérieur du château, je reste là, Maegor en face de moi. Nous nous toisons du regard un instant, avant que je brise le silence, fidèle à moi-même, qui ne peut rester silencieux bien longtemps. « Maegor, félicitations pour votre mariage » Est-ce réellement une félicitation ? Je ne pense pas, mais mon ton de voix sonne sincère. Je sais que nos conditions, nos statuts nous prédestinent à certaines choses qui ne dépendent en rien de nos choix, de nos désirs, qui sont bel et bien des obligations. Tandis que je le regarde, un sourire au coin des lèvres, je peux sentir cette tension dans l'air, une tension agréable, comme une passion dévorante qui brûle au fond de nous et qui ne demande qu'à s'exprimer pour nous consumer tout entiers.

Je peux remarquer le trouble de Maegor lorsqu'il s'approche de moi. Je pense qu'en cet instant précis, nous perdons tout deux un peu de nos moyens. Il faut dire que cela fait un bon moment que nous ne nous sommes pas croisés. J'ai presque l'impression que cela fait une éternité. Pourtant, il n'a pas changé, il me plaît toujours autant. Mon frère et Ser Lyam ne réagissent pas vraiment lorsque je romps le silence. Il faut dire qu'ils sont déjà bien trop occupés à bavarder entre eux et à prendre la direction du château. La réaction de Maegor me décroche un léger sourire. Toute cette courtoisie, tous ces titres, on n'en a pas vraiment l'habitude dans l'intimité, et pourtant ici, il faut bien sauver les apparences. Je pense que nous sommes tout deux conscient que même sans nous en rendre compte, nous sommes sans cesse observés et juger par tous ceux qui nous croisent. Cependant, jamais ô grand jamais il ne m'avait appelé par mon titre. Le Ser Jon sonne comme faux dans sa bouche et pourtant, je ne peux m'empêcher de m'amuser de la situation. Mon manque de sérieux reprenant toujours le dessus. Mettant une main sur le pommeau de mon épée, prenant une attitude plus décontractée que celle adoptée auprès des chefs de nos familles respective, je regarde Maegor en souriant. Mes yeux pétillent de malice et je m'approche un peu plus de lui, tout en restant à distance correcte pour ne pas éveiller les soupçons. « C'est un plaisir de vous voir, Ser Maegor » que je réplique sur le même ton politiquement correcte qu'il a employé plus tôt. « C'est un honneur d'être là, et de pouvoir vous tenir compagnie et d'assister à votre bonheur en ce jour si important » Mes yeux pétillants d'autant plus. Je sais parfaitement ce que je sous entend par le tenir compagnie, bien que le reste de ma phrase sonne faux. Je préférerais, évidemment qu'il ne se marie pas, qu'il n'est pas lui aussi l'obligation de répondre au devoir conjugal. Cette seule pensée me répugne. Bien sûr que j'effectue mon devoir conjugal, mais je suis devenu relativement possessif avec Maegor lorsque je suis en sa compagnie. Sachant toutefois que lorsque je suis loin, les choses sont différentes. Mais en cet instant, près de lui, je n'ai qu'une seule envie, c'est qu'il m'appartienne corps et âme.

Je tourne la tête un instant vers mon épouse qui s'adresse à moi en m'expliquant qu'elle va visiter les jardins avec une des sœurs de Maegor, ce qui m'enchante au plus au point. Je réplique, non sans hypocrisie « Profitez en bien, explorer tout, ils sont magnifiques, vous allez en avoir plein les yeux ». Mon épouse n'y voit effectivement que du feu. Voilà un bon paquet d'années que je cultive l'art du mensonge afin de mieux dissimuler, mais diverses infidélités et surtout celles qui sont prohibées. J'efface presque instantanément ce sourire idiot qui orne mon visage pour me retourner vers Maegor. Ma mine se radouci et je lui déclare, plus doucement. « Peut-être pourriez-vous me guider jusqu'à ma chambre ? Voilà bien trop longtemps que je ne suis pas venu à Hautjardin, je risquerais de me perdre dans les couloirs » La nouvelle lueur malicieuse vient enflammer mon regard, tandis que j'attends sa réponse, non sans impatience.